Le retour d'un long, très long voyage

La foule était en délire. Dans le colisée, deux hommes s'affrontaient. L'un était vêtu d'une armure en cuir, alors que l'autre n'était pas protégé et ne portait que du tissu de mauvaise qualité. L'un maniait une énorme hache alors que l'autre maniait une épée longue. Deux barbares. Ils se fixaient, la peur pouvait se lire dans leurs yeux alors que l'on annonçait leurs noms. Le match allait commencer. La foule était en délire. C'était le moment le plus intense du match. Personne ne les connaissait. Ils n'avaient pas d'amis. Pas de famille. Tout du moins plus. Si les gens étaient présents lors de cette journée ensoleillée qui brûlait la peau de nos deux combattants, c'était pour voir du sang.

Les deux combattants, après une période relativement courte durant laquelle ils s'étaient jaugés, s'élancèrent dans un même instant et dans une même rage sur l'autre. L'un bloqua avec son manche le coup d'épée de l'autre, puis lui asséna un coup de pied dans le ventre et l'envoya à terre avant de lever sa hache et de l'abattre sur son crâne. L'autre roula au sol et envoya de toutes ses forces son épée qu'il venait de ramasser dans le flanc de son adversaire. Un fil rouge en suivit la pointe. Il avait blessé le torse de son adversaire torse nu. Ce dernier, visiblement peu préoccupé par ce détail jura, puis envoya l'épée de son ennemi voler quelques mètres plus loin avant de lever sa hache en l'air.

Tout le monde attendait ce moment. Tout le monde attendait la mise à mort. Des pouces se levèrent vers le haut. D'autres se baissèrent, mais la majorité l'indiquait; la mise à mort allait avoir lieu. La hache allait s'effondrer sur le crâne du pauvre malheureux dans un bruit horrible d'os qui craqueraient, dans une effusion de sang, de rage et de barbarie sans nom. Tout ça pour le plaisir de quelques bourgeois et autres nobles sans intérêt. Alors que l'homme semblait perdu, un homme sauta dans l'arène.

??? : Je m'insurge contre cette mise à mort. S'il n'est pas capable de se battre, je vais le faire en son honneur de combattant.

La surprise ne touchait pas seulement la foule, le combattant qui allait achever l'autre avait posé son arme, impressionné par tant de noblesse d'âme et de courage. La foule semblait également touchée, bien que dans l'ensemble, elle était intéressée par ce nouveau combat. Plus de violence, gratuitement. Elle n'allait pas se plaindre. Les organisateurs et autres hommes influents du Colisée firent un signe approbatif à leur barbare.

Homme à la hache : Et qui es-tu, toi, pour t'opposer à Grag'Kuk le bourreau ?

???: Mon nom importe peu, je désire juste sauver cet homme. Sa vie contre la mienne, c'est un bon marché, non ?

L'homme était vêtu d'une tunique en cuir sombre, tirant sur le noir. Sur son bras droit, un morceau d'armure cloutée rouillée jonchait, protégeant le début du bras, laissant l'avant-bras visible et vulnérable. Son bras gauche n'était pas protégé, mais un symbole était visible sur ce dernier : Il était fait de noir, semblait impossible à enlever et représentait des ronces qui s'élevaient et continuaient sans doute sur une partie de son corps. L'homme portait également une cape noire qui cachait son dos, ainsi qu'un capuchon lui aussi noir en tissu, qui cachait son visage. Il n'avait aucune arme apparente, mais portait des bottes légères, de toute évidence en cuir, couvertes de boue, ce qui montrait son apparent penchant pour le voyage.

Grag'Kuk: Et tu es armé ?

???: Je n'en aurais pas besoin.

Le barbare éclata de rire. ""Soit. Puisque tu refuses de nous donner ton nom, je vais devoir t'exécuter anonymement ! ", dit-il avant de s'élancer sur l'homme vêtu étrangement, prêt à lui envoyer un coup de hache dans le cou. Ce qu'il fit. L'homme se contenta d'esquiver en roulant sur le côté et de lui asséner un coup de poing dans le visage.. Tout aurait été normal, si le coup de poing porté par un homme assez petit et sans aucune arme à un barbare de plus de deux mètres de haut, entraîné à recevoir les coups et célèbre dans le Colisée pour sa furie et sa rage ne l'avait pas envoyé au sol.

Abasourdi, l'homme se releva, ramassa son arme et fixa son adversaire. " Tu as eu de la chance, tu cognes sec, mais ça ne suffira pas ! ". Un sourire se dessina sur le visage de l'homme encapuchonné, lançant un défi à son adversaire. Défi qu'il releva rapidement en se jetant sur lui de plus belle avec sa hache, cette fois-ci, au lieu d'esquiver, l'homme se contenta de bloquer ... Avec ses bras. Les deux restèrent plusieurs secondes, l'un à forcer pour tenter de rompre la défense de l'autre. L'autre pour se protéger. Au final, l'homme envoyé Grag'Kul au sol d'une balayette relativement bien placée, saisit sa hache et la leva, avec un peu de peine, d'une main vers le ciel, victorieux.

Le silence régnait. Ni l'homme à l'épée qui était resté en retrait afin de voir son sauveur se battre, ni la foule, ni les organisateurs, ni Grag'Kul n'en revenaient. En moins de cinq minutes, un parfait inconnu à l'apparence étrange venait de détruire la réputation d'un homme, réputation fondée pendant des mois. Des pouces commencèrent à se lever. D'autres se baissèrent. Fixant toutes ces demandes de mise à mort, l'homme saisit la hache à deux mains et la planta dans le sol, juste à côté du corps terrifié de son adversaire.

???: Je ne suis pas ici pour te tuer. Je suis ici pour libérer cet homme, tout du moins temporairement. Est-ce que quelqu'un s'y oppose ?

Devant le silence de la foule et la surprise de tout le monde, l'homme, cette fois-ci, se mit à hausser le ton.

???: EST-CE QUE QUELQU'UN S'Y OPPOSE ?

Plus personne n'osait faire de bruit.

???: Bien. Dans ce cas, nous partons.

Et l'homme s'en alla avec son sauveur.